La vie de guerrier, c’est bien, mais vous en avez peut-être marre des roguelikes à la sauce heroic-fantasy et de leurs gobelins débiles qui se font défoncer par le moindre quidam avec un cure-dent, et je vous comprends. Mais si je vous proposais un roguelike contemporain anachronique qui mérite que vous y jetiez un œil à défaut des deux, vous en penseriez quoi ? Eh bien voilà, c’est fait : Skyhill vous place dans la suite nuptiale panoramique d’un hôtel et vous invite pour une descente à l’accueil un peu spéciale. Projecteur sur un mutant !

Vous étiez en ville pour affaires, mais autant joindre l’utile à l’agréable, et vous louez une suite nuptiale dans l’hôtel Skyhill, à son dernier étage, le centième, pour profiter du paysage. Malheureusement, c’est la tuile lorsqu’une bombe biologique explose dans la mégapole, transformant tous les bons humains en mauvais mutants. Dans ce chaos, vous avez la chance d’être protégé dans ce bel immeuble aux protections anti-biologiques inviolables. Vous vous êtes cloîtré dans votre suite en écoutant l’horreur autour de vous. Mais que faire dans une chambre, certes grande, qui ne vous sustentera pas plus d’un moment ? Il vous faut donc partir et descendre pour sortir en ville. 

DESCENTE EN E​NFER

C’est grâce à une BD stylisée bien efficace, du type de celle de Max Payne, que vous prenez contact avec ce roguelike. En début de partie, vous choisissez le niveau de difficulté parmi trois, une compétence passive et une active, à condition de les avoir débloquées auparavant. Mais j’y reviendrai un peu plus bas. Ensuite, vous commencez la partie dans un système on ne peut plus simple. À l’écran, vous pouvez voir votre personnage, l’étage dans lequel vous êtes, celui du dessus déjà visité, mais celui du dessous reste inconnu, brouillard de guerre en quelque sorte. Votre objectif est de descendre les cent étages qui vous séparent de la sortie. Pour cela, vous transitez par l’escalier central comprenant aussi un ascenseur. De part et d’autre, vous avez une chambre dont le contenu est aléatoire. Ne cherchez pas une quelconque quête secondaire, il n’y en a pas. Ni d’ailleurs de quête principale. Nous sommes dans un roguelike avant tout.

Et pour réussir votre escapade, la difficulté du jeu réside dans la gestion des paramètres “faim” et “santé”. En effet, à chaque fois que vous arrivez dans une pièce, vous dépensez un point de faim. Et si vous n’avez plus de points de faim, vous perdez deux points de santé par tour. Eh oui, je ne vous l’ai pas dit, mais le jeu fonctionne au tour par tour, ce qui lui sied très bien vu les mécanismes utilisés. Et puis, vous pouvez rencontrer un mutant dans chaque pièce découverte, qu’il vous faudra affronter. Le combat fonctionne de deux manières différentes, au choix.

Soit vous cliquez sur l’ennemi et il prend des dégâts, soit vous optez pour le combat avec localisation des dégâts, et dans ce cas, une interface du mutant apparaît avec trois choix de frappes ciblées. Ainsi, en visant la tête, le pourcentage de réussite dépendant de votre précision sera moins élevé, mais les dégâts seront plus importants, alors qu’en visant les membres, vous aurez un taux de réussite élevé, mais ferez moins de dégâts. Tout est un choix et pour ma part, je préfère jouer avec localisation des dégâts, en ayant sous les yeux les points de vie du mutant, pour savoir ce qui est le mieux (frapper la tête ou les pieds, c’est un art). Et pour un peu plus de rythme dans ce jeu au tour par tour, on peut accélérer la vitesse des déplacements de son personnage. De toute manière vos ennemis ne changent pas de salle. 


Chaque mutant mort propose du loot, tout comme certaines pièces. Ce loot peut être de différents types, comme de la nourriture, parfois pourrie, des armes, du matériel. Il faut alors savoir qu’en remontant dans votre chambre VIP au centième étage, vous pourrez crafter de nouveaux éléments selon le niveau de votre établi ou celui de vos connaissances en recettes. On peut aussi, selon son matériel, augmenter le niveau de son établi ou encore la qualité de son lit ou de sa porte. L’intérêt de la chambre est tout simplement de pouvoir dormir pour récupérer des points de santé tout en dépensant des points de faim. C’est cet équilibre entre la faim et la santé qui vous permettra de survivre. J’aurais envie de dire que le jeu est donc un FTL en mode vertical, et la fuite en avant est la solution idéale pour vous en sortir avant que la nourriture ne manque. Rien ne sert de traîner pour vous sortir de là.

D’ailleurs, pour aller plus vite, il vous faudra réparer les transformateurs dans les étages inférieurs pour pouvoir utiliser l’ascenseur et remonter à l’étage désiré, voire dans votre cachette au centième. Parce que vous trouverez dans cet hôtel un ou deux PNJ prêt à échanger un objet dans votre aventure, voire des distributeurs vers l’escalier que vous ne pourrez utiliser qu’en ayant trouvé des pièces de monnaie et il vous faudra retenir le numéro de l’étage pour y retourner.  

APOCALYPSE N​OW

Ce qui est particulièrement jouissif dans Skyhill, c’est cette ambiance glauque dont la sensation de fin du monde vous prend aux tripes. Pas besoin de graphismes 3D avec effets lumineux, la 2D fait très bien son office avec une saturation du noir pour une atmosphère dark et des jeux d’ombre sur votre personnage en chemise cravate et sur les mutants. Le jeu se rapproche de This War of Mine, pour vous donner une idée, avec un graphisme plus dessin stylisé.

C’est très efficace et simple, et les animations sont suffisantes pour satisfaire. Du coup, c’est un jeu plutôt léger au niveau de la configuration à utiliser. Et contrairement à bien d’autres à leur lancement, il se montre très stable et ne présente pas de bug. Les différentes pièces que vous découvrirez sont reconnaissables d’un coup d’œil, et comme elles sont aléatoires, il ne faudra pas vous étonner de découvrir une chambre à deux lits, une cuisine au 65ème étage ou encore un bureau. On trouve de tout dans Skyhill, et pas que des couchages. 

Rajoutez à cela l’ambiance sonore (les textes du jeu sont en français en plus, même si les voix restent en anglais), les messages laissés ici et là, des scènes fixes mettant en scène des personnages totalement abattus dans certaines chambres, ou encore des portables qui vous injectent à petite touche des textos alarmistes sur la situation, et vous comprendrez que tout est fait pour vous plonger dans le chaos. On a qu’une envie, c’est de descendre le plus vite possible et de s’enfuir de ce lieu.

Mais attention car la mort est permanente et vous devrez recommencer de votre chambre nuptiale. Le “die and retry” est donc monnaie courante, et plus vous descendrez, plus vous débloquerez de compétences qui pourront être acquises en début de partie pour recommencer dans de meilleures conditions. Ainsi vous pourrez partir avec un sac de bouffe ou de soin, ouvrir toutes les serrures, faire plus ou moins de dégâts. Disons-le tout de suite, les compétences déséquilibrent totalement le jeu mais permettent une approche différente, et surtout de finir le jeu au moins une fois. Il m’a d’ailleurs fallu 15 minutes pour finir une partie et me faire surprendre par cette conclusion tout à fait déroutante. Mais je ne vais pas spoiler. 


Outre la compétence passive et celle active, votre personnage a quatre caractéristiques (force, vitesse, dextérité, précision). Chaque caractéristique permet d’améliorer les armes spécifiques de leur catégorie et propose un bonus différent. La force permet de faire des coups critiques, la vitesse de gagner un tour supplémentaire pour frapper, la dextérité d’esquiver et la précision d’avoir un bonus pour toucher. Il faut savoir que vous gagnez de l’expérience, et qu’à chaque niveau vous pouvez dépenser quatre points où vous le souhaitez dans ces caractéristiques. En fait, cela dépendra surtout des armes que vous aurez trouvées. L’inventaire est composé d’un fond sans fin et vous aurez deux emplacements pour vous équiper : vos deux mains. Libre à vous de mettre deux armes ou une arme et un objet, type trousse de soin, mais sachez qu’en cas de conflit, vous n’avez pas accès à l’inventaire, juste à vos deux mains dont l’équipement est visible en combat. Vous pourrez toujours vous enfuir devant l’ennemi, mais certains pourront vous frapper au passage. 

En parlant d’eux, la configuration des lieux et le fonctionnement du jeu ne vous permet de les affronter qu’à un contre un, et ils possèdent chacun leur propre style d’attaque, entre ceux qui vous empoisonneront, ceux qui fuiront après vous avoir malmené et que vous retrouverez un peu plus bas, les grands et les moyens à grosses masses à la place des bras ou encore ceux qui ont de multiples attaques en un tour. De toute manière, sachez que les ennemis ne bougent pas de place et vous attendent sagement, car dès que vous en trouverez, leur but sera de vous éliminer. 

LE SKY EST CHER !

Skyhill propose donc une jouabilité simple et efficace, avec l’utilisation d’une souris et de son clic gauche pour tout faire. Et la mort vous permettra d’apprendre pour mieux appréhender ce huis clos et recommencer une partie. Mais il y a des choses qui fâchent, car on en deviendrait presque exigeant devant ses qualités. Tout d’abord, si le craft est bien pensé, il est dommage qu’on ne puisse pas détruire des objets pour en faire d’autres. Surtout que les transformateurs des ascenseurs coûtent cher à réparer en matériel souvent précieux.

À quoi sert-il d’avoir en fin de partie le plein d’armes variées alors qu’on pleure pour trouver le moindre bout de ferraille ? Ensuite, pris en main, le loot, facile à agencer car on en connaît toutes les formules d’entrée de jeu, est très rapidement limité. Enfin, cette mécanique risque à la longue d’être redondante, car après l’effet de surprise, les gestes sont répétitifs et le manque de richesse se fait ressentir, même si comme je le disais, en début de partie on est agréablement surpris par les possibilités.

Enfin Skyhill, passant par la plateforme de téléchargement Steam et par un éditeur, se vend quinze euros. C’est quand même cher pour le contenu, sachant que le jeu prévoit de sortir sur iOS et Android, il ressemble à s’y méprendre à un jeu porté sur PC. Pour les options, il propose le minimum avec juste un réglage de la résolution. De plus, la durée de vie peut se résumer à quelques heures. On y reviendra sûrement pour tester d’autres combinaisons de compétences qui sont, à mon avis, très mal équilibrées, mais je reste dubitatif sur la longueur.

Autant un Dungeon of Dredmor ou un Tales of Maj’Eyal vivront longtemps du fait de leur richesse, autant Skyhill se présente plus comme un jeu rafraîchissant à avaler d’une traite. Reste à voir si les développeurs sauront nous proposer des choses en plus dans les prochains patchs. Donc s’il vous fait envie, tentez la démo (à retrouver sur le lien de téléchargement de la page Steam du jeu). 

Avec son ambiance de fin du monde et cette fuite en avant, ou plutôt devrais-je dire vers le bas, Skyhill est une très bonne surprise. Mais contrairement à des poids lourds du genre, on ne peut que le considérer comme un roguelike apéritif, car vous en ferez vite le tour.
Trop cher mais textes en français, il est intéressant, immersif et mérite votre attention – surtout le jour où il sera en solde. Toutefois, il est toujours possible d’essayer la démo pour voir si le plein investissement vaut la peine.  

+ Très bonne ambiance
+ Roguelike original
+ Combat simple et efficace

Note testeur 07 sur 10

– Trop cher sur PC à cause de la durée de vie
– Au vue de ses qualités, contenu limité
– Ressemble à une adaptation de Portable

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