En l’an de grâce 2009, les hongrois de Neocore games nous offraient enfin un jeu digne de la légende arthurienne. Avec un gameplay mélangeant stratégie et jeu de rôle, King Arthur : The Role Playing Wargame s’est depuis offert une place dans le coeur des joueurs. Après nous avoir fait vivre l’ascension d’un certain Arthur Pendragon, les développeurs nous invitent à revenir dans cet univers avec un deuxième opus prenant place dans une Grande-Bretagne en décadence.

Arthur gît mortellement blessé suite à une tentative d’assassinat, le graal est brisé, les chevaliers ne sont plus unis comme par le passé, et pendant ce temps, l’ombre maléfique d’une armée démoniaque grandit.

Les premières minutes du jeu suffisent à nous rappeler à quel point le premier opus était si unique dans le paysage fort peuplé des jeux de stratégie. En effet, le prologue qui permet de débuter l’aventure se révèle être une cinématique illustrée par de multiples artworks, et surtout interactive. Elle nous conte les événements qui viennent de marquer au fer le royaume de Bretagne et permet au joueur, incarnant William Pendragon – le fils d’Arthur et accessoirement héritier du trône – de faire ses premiers choix stratégiques.

D’un point de vue narratif, le jeu dispose d’ailleurs d’un excellent fond. Si la légende arthurienne servait réellement de base pour l’histoire du premier King Arthur, ici, on est plus dans un prolongement imaginaire de la légende. La menace démoniaque est ainsi inspirée des légendes irlandaises, et le jeu a un aspect fantasy plus prononcé que son aîné, sans que cela ne choque. 

L’introduction terminée, le joueur peut alors découvrir une carte géographique de la Grande-Bretagne actuelle, et comme par le passé, il aura pour objectif de reconquérir cette terre en proie au chaos. Dès lors, la campagne peut commencer, d’une manière très dirigiste, à la manière d’un tutoriel. Le jeu repose comme son aîné sur trois principaux piliers que sont la narration, la gestion/diplomatie sur la carte globale, et les combats en temps réel. Il faudra donc apprivoiser ces trois manières de jouer pour arriver à ses fins. De ce point de vue, King Arthur 2 s’en sort bien et donne l’occasion au joueur lambda de prendre en main le gameplay en douceur.


Très vite, on remarque que quelques changements assez radicaux ont été apportés. Lorsque l’on cite le genre auquel appartient le premier King Arthur, on pense inévitablement au leader incontesté qu’est Total War. Il n’est pas impossible que les créateurs aient voulu changer de direction dans le but d’éviter une confrontation directe, mais c’est aussi l’occasion de coller plus encore à leur volonté de proposer un jeu à la narration forte. Concrètement, le jeu est plus linéaire que par le passé : la narration de King Arthur 2 fait perdre la liberté qu’on peut avoir dans d’autres wargames. En effet, la majorité des batailles seront dictées par le scénario et constitueront des passages obligés. Bien entendu, le joueur peut décider quand il va agir, il peut par exemple attendre plusieurs tours (symbolisés par des saisons) dans le but de se refaire une santé, ou encore décider de faire telle ou telle quête secondaire au préalable.

Néanmoins, ces quêtes arrivent à des moments précis, et elles sont donc peu nombreuses à un instant donné. Dans le premier King Arthur, conquérir une région vous donnait des avantages ; elle pouvait conférer un bonus à tel type d’unité par exemple. On retrouve ce système dans le second opus, par l’intermédiaire de bâtiments à construire et de technologies à rechercher. Les provinces permettaient également au joueur d’accumuler des ressources comme de la nourriture, mais aussi de l’or, via différents moyens de productions. Dans King Arthur 2 en revanche, toute cette partie économie a disparu (plus d’impôts …).

Ainsi, le seul moyen d’obtenir de l’or se fait par la résolution des combats ou de certaines quêtes. La nourriture a été complètement radiée du système de jeu. De facto, il n’y a plus de notion d’entretien des troupes (ils mangent quoi alors, leur slip ?). Les craintes dont je faisais part dans la preview du prologue étaient fondées : la partie gestion a été amputée dans l’ensemble du jeu, et pas uniquement dans le DLC Dead Legions qui pouvait faire office de tutoriel.

Pour autant, tout n’est pas à jeter dans ce King Arthur II, bien au contraire. Comme dans les autres wargames, vous passerez une bonne partie du temps à guerroyer : les combats sont une composante importante du jeu, et certains ajouts sont réellement réussis. Ces batailles se déroulent en temps réel, à la manière d’un Total War. Le joueur part généralement d’un endroit de la carte avec toutes ses troupes, tandis que l’ennemi est à l’opposé. Premier constat : avant d’engager les manœuvres militaires, une petite cinématique parcourt la carte et met en exergue certaines zones précises.

Ces endroits spéciaux sont des points de contrôle qui peuvent être conquis par les joueurs, cette mécanique de jeu rappelant certains FPS multijoueur avec leur mode capture the flag. Ils octroient des avantages de choix comme des sortilèges très puissants ( foudroyer les ennemis, les ralentir …) ou améliorent les statistiques de certaines unités. Ainsi, la capture de telle ou telle source de pouvoir peut renverser l’issue d’un combat. En lien direct avec cet ajout, vient l’apparition d’une barre de bouclier magique.

Celle-ci permet à votre armée d’encaisser, d’absorber un certain nombre de sortilèges. Plus votre barre est élevée, plus les sortilèges absorbés peuvent être puissants : un bon moyen de préserver temporairement ses troupes et de gagner du temps.


L’utilisation des héros n’est d’ailleurs pas à négliger. Il y a trois types – on pourrait parler de classe – de héros : les mages maîtrisent la puissance des arcanes et sont donc des atouts de poids, les champions sont des héros polyvalents forts au corps à corps mais connaissant quelques sortilèges modérément puissants et enfin, les chefs de guerre qui octroient des bonus aux autres unités.

Dès lors, les stratégies sont multiples, et le jeu est de ce point de vue plus profond et tactique que son prédécesseur. Les cartes sont bien agencées ce qui permet d’avoir continuellement des combats prenants et jamais gagnés d’avance. Enfin, l’apparition de troupes aériennes chez les ennemis amènera le joueur à repenser sa stratégie. Notez au passage que les moins stratèges peuvent résoudre automatiquement les combats. Un ajout étrange compte tenu du fait que les dits combats sont l’un des piliers du jeu.

En réalité, en jouant à ce King Arthur II, un connaisseur du premier volet aura une étrange sensation. A chaque fois qu’une nouveauté apparaît, c’est comme si les développeurs simplifiaient un autre aspect du jeu. La gestion des héros, par exemple, est plus approfondie dans le sens où désormais, ceux-ci peuvent se marier, avoir des provinces ou encore disposer d’artéfacts magiques améliorant leurs aptitudes, objets pouvant être obtenus en récompense de certaines quêtes ou créés par le joueur à la forge, qui est une autre nouveauté de cet opus.

En revanche, l’évolution des héros est simplifiée et ceux-ci ne peuvent plus avoir d’armée sous leur ordre : il n’y aura ainsi qu’une seule armée à vos ordres sur la carte de la Bretagne. Dans un autre ordre d’idées, je parlais des combats très réussis, car plus tactiques et toujours très tendus. Pour autant, le concept de moral des troupes qui existait dans le premier King Arthur est ici absent : la victoire se solde obligatoirement par l’élimination totale de l’armée adverse.


King Arthur : The Roleplaying Wargame était un bon jeu de stratégie, et surtout original de part son aspect RPG. King Arthur II ne change pas la donne, bien au contraire. On retrouve là encore le système de quêtes inspiré des Livres dont vous êtes le héros.  Ces histoires textuelles (en anglais) nous sont contées par une voix off, et plusieurs doubleurs ajoutent leur voix quand d’autres personnages prennent la parole.

Le joueur se verra proposer plusieurs choix primordiaux pour la résolution des quêtes, qui détermineront par exemple quelles récompenses il va obtenir, ou quelle somme d’or il va être amené à dépenser, mais elles sont surtout l’occasion d’agir sur l’aspect diplomatique du jeu. Les seigneurs impliqués dans une quête sont nombreux, et il sera difficile de satisfaire tout le monde. En gagnant la confiance d’un autre seigneur, vous pourrez par exemple pactiser avec lui.

De plus, plusieurs guildes ou groupes indépendants viennent mettre leur grain de sel. Pactiser avec la guilde des voleurs vous permettra de recruter un assassin pour rayer un héros ennemi de la surface d’Albion et ainsi affaiblir son armée. Dans un autre ordre d’idées, certaines quêtes peuvent s’achever de manière pacifique ou au contraire dans un bain de sang, toujours selon vos choix. 

King Arthur II a hérité d’une des meilleures trouvailles de son aîné qu’est la gestion de l’alignement. Votre attitude pourra faire de vous un tyran ou au contraire un souverain clément. Ce même comportement pourra vous attirer les faveurs du Pape et de l’église nouvelle, ou au contraire des druides et des anciennes religions celtes. Concrètement, cet alignement vous permettra d’accéder à de nouvelles unités ou à de nouveaux pouvoirs, comme dans le premier opus.

La qualité d’écriture est là encore au rendez-vous et surtout très immersive, si bien que c’est un plaisir de découvrir ces quêtes qui sont parfois très bavardes. En revanche, et comme son prédécesseur, le jeu n’était au départ qu’en anglais. D’après ce que j’ai pu lire sur les forums, une traduction officielle française est disponible. C’est mieux que rien, mais elle n’est apparemment pas complète : les quêtes en français côtoient des textes de menus en anglais.  

Je n’ai pas pu la tester, mais sachez que la version anglaise comporte bon nombre de textes et il est ainsi conseillé de maîtriser un tant soit peu la langue de Shakespeare.


Enfin, penchons-nous sur la réalisation du jeu. C’est très simple, d’un point de vue graphique, le magnifique côtoie le correct, mais dans l’ensemble, c’est d’un très bon niveau. La carte globale est par exemple la plus jolie qu’il m’ait été donné de voir dans un jeu de stratégie, avec des effets de météo somptueux. De même, les cartes de bataille sont riches en détails, et les effets de lumière sont très réussis. Les unités sont correctement modélisées, et bénéficient d’un excellent design, et il en va de même pour les ennemis si vous acceptez les libertés prises par les développeurs vis à vis du “mythe arthurien”. Les affrontements, qui sont meilleurs dans ce King Arthur II, bénéficient d’une caméra de bataille plus souple et efficace. Au chapitre des regrets, on notera quelques soucis de pathfinding et des animations en deçà du ténor du genre, Shogun 2 : Total War.

Vous n’en aurez pas que pour vos yeux avec ce jeu, puisque la partie sonore bénéficie d’un excellent traitement. Outre les doublages, ce sont de superbes compositions qui viennent agrémenter les séances de jeu, et qui rendent les batailles tout bonnement épiques. 

Pourtant, si le tableau de la réalisation semblait quasi sans faute, il cache un énorme défaut : l’optimisation. Si elle est un peu meilleure qu’il y a trois mois, lors de la sortie du jeu, elle reste de piètre qualité en comparaison de celles des productions concurrentes. Il est ainsi recommandé d’avoir une bonne machine pour profiter du jeu, et même avec un PC de la Nasa, n’espérez pas atteindre un framerate monstrueux. Les bugs étaient au départ assez nombreux, mais le jeu est relativement bien suivi par les développeurs, et plusieurs patchs ont déjà réglé  les soucis majeurs, notamment dans les scripts des quêtes qui pouvaient bloquer la progression.

Au final, King Arthur II : The Roleplaying Wargame est un bon jeu. Solide dans son gameplay, plaisant à jouer et beau à regarder, il n’a pour ainsi dire qu’un gros défaut ; être la suite de King Arthur. Les développeurs ont vraisemblablement voulu séduire un nouveau public, notamment en améliorant la narration. Si, sur ce point, les choses sont très réussies, cette narration rend le jeu plus linéaire dans sa partie wargame, avec une phase de gestion qui, en plus d’être simplifiée, semble artificielle.

Ainsi, ceux qui aimaient cet aspect dans le premier volet risquent d’être déçus. Mais en oubliant quelque peu ses racines de wargame, King Arthur II propose une expérience différente de tous ses concurrents. Les stakhanovistes du genre n’apprécieront peut-être pas (et peuvent enlever un point à la note), mais les amateurs de stratégie moins exigeants découvriront un jeu qui est mine de rien très original de part sa narration à choix multiples, et proposant une longue et belle aventure.

+ L’ambiance arthurienne
+ Les musiques
+ La narration
+ Le design
+ Les combats tactiques

Note testeur 07 sur 10

– Simplifications (exit la gestion …)
– La localisation
– L’optimisation à revoir

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