Joueurs du dimanche et noctambules, c’est après une nécessaire période d’hibernation que je m’en reviens aujourd’hui pour vous parler d’un jeu qui a déjà fait couler pas mal d’encre numérique sur ce forum. Non, pas The Witcher III. Non, Dragon Age : Inquisition non plus. Non, pas The Banner Sag… Bon, arrêtez, ça commence à être irritant toutes ces interruptions !

Bref. Je veux bien sûr parler de Serpent in the Staglands, titre issu du studio indépendant Whalenought Studios et paru le 28 mai 2015 en anglais exclusivement sur PC. Un jeu très particulier car surfant sur une tendance récente consistant à revêtir les oripeaux des titres soi-disant hardcores d’il y a trente ans… vous savez, les Baldur’s Gate, les Might & Magic, le genre de trucs que j’adore mais dont les imitations me font hausser les sourcils de suspicion à cause de leurs défauts souvent rédhibitoires. Du coup, s’agit-il d’une pâle copie ou de quelque chose de vraiment unique ? Suivez-moi pour le savoir… mais n’oubliez pas de vous signer auparavant, car votre âme va être mise à rude épreuve.

Un dieu parmi les hommes

Notre histoire débute dans une crypte. Hélas, il ne s’agit pas du prélude d’une soirée romantique pour amateurs de cuir et de fouet clouté, mais plutôt d’un tête-à-tête avec une chroniqueuse encapuchonnée aux yeux étincelants comme des étoiles. Sans plus de préambule, la larronne vous harponne de questions visant apparemment à établir les fondations d’un culte dont nous serions l’attraction principale : comment s’est déroulé le premier contact avec les fidèles ? Pourquoi avez-vous décidé de vous manifester ? À quel collègue divin vous êtes-vous associé ? Autant de points de dogme qui auront leur importance par la suite. La scène hallucinée prend fin lorsque votre interlocutrice referme finalement son pesant volume de cuir.

Cette introduction conclue, vous vous réveillez sous la forme d’une ombre imprécise enfermée à l’intérieur d’un cercle d’invocation, lequel se trouve en plein milieu de la salle de communion d’un temple gothique. Un homme chenu s’avance alors vers vous et s’inquiète de votre condition. Il se présente comme votre haut-prêtre… ce qui vous permet de vous rendre compte que vous n’êtes nul autre que Necholai, une divinité mineure liée à la lune qui a pour habitude de s’incarner de temps à autre pour vaquer un peu parmi les mortels – détail que votre archonte est le seul à connaître. Le problème, c’est qu’un phénomène magique inexplicable mais clairement provoqué vous empêche de retourner dans votre domaine astral et du coup de récupérer vos immenses pouvoirs. Dès lors, au lieu de vous tourner les pouces tandis que vos acolytes découvrent la source de cet inadmissible blocus, vous décidez de vous vêtir d’un manteau de chair et de découvrir par vous-même de quoi il retourne.


Que ce soit seul, avec des avatars sans âme créés pour l’occasion ou avec des compagnons d’infortune, vous allez donc parcourir les dangereuses terres de Vol – et plus particulièrement celles de la région des Staglands – sans rien d’autre pour commencer que les nippes que vous portez sur le dos. Autant dire que l’entreprise va s’avérer complexe malgré votre couverture de marchand d’épices itinérant.

Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?

L’une des principales qualités que l’on peut reconnaître à Serpent in the Staglands réside dans son caractère complet dû aux nombreux emprunts qu’il fait au genre du jeu de rôle papier. Ceci est en particulier visible dans la feuille de personnage qui figure de nombreuses caractéristiques principales fixes – deux concernant les capacités physiques, deux pour les capacités magiques et une plus générale sur les capacités d’observation –, mais également d’autres telles que les chances d’esquiver ou d’attaquer à base de jet de dés. Bon, l’ensemble manque de lisibilité et de détails, mais il est tout à fait possible de comprendre sur le tas comment tel paramètre influe sur tel aspect si vous avez décidé de faire l’impasse sur le manuel qui se trouve à part du jeu. Détail que je trouve pour ma part contre-intuitif, mais il parait que ça fait partie de l’expérience “old school”. Soit.

La fiche de personnage comprend un second encart réservé à l’inventaire. Chaque protagoniste dispose ainsi de douze emplacements d’équipement, de l’arme aux bottes en passant par le casque, ainsi qu’un accès à un stock de groupe sans fond. Ce dernier est lui-même divisé entre éléments utilitaires et éléments-clés type parchemins ou outils de déchiffrage, tous bénéficiant d’une description aussi exhaustive qu’absconse. Pourquoi absconse ? Parce qu’à l’instar d’un Dark Souls vous n’aurez jamais qu’une vague idée de l’intérêt d’un objet avant de l’essayer ou de vous trouver dans une situation le requérant. Par exemple, autant on pourra comprendre la valeur régénératrice d’un bon steak de loup découpé à même la bête, autant on pourra douter de l’utilité d’un nécessaire d’écriture… sauf qu’il n’est pas impossible que celui-ci soit nécessaire à un moment pour une interaction future. Vous voyez ce que je veux dire ?

Certes, le jeu ne prend pas en compte la fatigue ainsi que la nécessité du boire ou du manger, mais étant donné que la moindre babiole coûte un bras et que votre dieu sous couverture commence l’aventure avec juste ses nippes sur le dos, vous serez tenté en permanence de négocier votre fatras sans connaître sa véritable utilité. Ce choix esthétique me semble d’autant plus aberrant qu’il est accompagné d’un système de craft occasionnel mais bien présent… mais surtout vis-a-vis du fait qu’on incarne un DIEU QUI A TOUJOURS FAIT DES VISITES SUR VOL DEPUIS DES SIÈCLES MAIS QUI EN SAIT MOINS SUR LA VIE AU QUOTIDIEN QUE LE PEQUIN MOYEN. Encore une fois, on va dire qu’il s’agit d’un parti-pris censé renforcer l’immersion du joueur, même si la police de caractère employée rend la lecture de l’ensemble un peu plus confuse.


Laissons de côté pour l’instant les trois livres de compétences qui constituent le reste de la fiche de personnage et intéressons-nous à des détails plus généraux. En tant que divinité plus si omnipotente que ça, vous aurez le choix pour vous incarner entre 5 races déclinées en trois sous-espèces. Originales par leur background très élaboré – même si on ne pourra découvrir la majeure partie de celui-ci que par petites touches au gré du jeu –, elles se résument à des déclinaisons d’humains et d’elfes façon The Elder Scrolls à la sauce Europe de l’Est. Je vous prie de croire que me mettre dans la peau d’un brouteur de laitue ne me poserait pas plus de problème que ça si l’expérience était convaincante… or le fait est que les seules options de personnalisation se résument à trois ou quatre têtes/portraits différents pour chaque sexe de race, ce que je trouve assez léger puisque du coup vous allez croiser une foultitude de clones au cours de vos pérégrinations. Le pire, c’est que le choix de votre espèce et de votre spécialisation n’aura qu’une influence sur vos caractéristiques, puisque vos interlocuteurs se foutront toujours pas mal de vos origines. Mais vous savez quoi ? On va dire qu’il s’agit d’un parti-pris à cause de la petitesse de l’équipe de développement et de son probable manque de moyens.

Et là, chers lecteurs, se pose à moi un dilemme : cet article vient à peine de commencer et je viens déjà de brûler les trois jokers “parti-pris” que je m’étais autorisés de façon à garder l’esprit ouvert sur un jeu soi-disant old school qui semble avoir accumulé davantage de défauts que de qualités des RPG de “la belle époque”. Dois-je néanmoins continuer sur ma lancée, sachant que je risque sérieusement de m’acharner sur les défauts de la bête et de me faire taxer de mauvaise foi comme avec l’insupportable Lords of Xulima ? Réglons cela à pile ou face.

Bien. I’m on the Highway to Hell, comme on dit.

Be mine. Body and soul

Pour découvrir les mystères de la sordide région des Staglands, Necholai pourra être accompagné par quatre compagnons. Si au commencement de l’aventure il pourra créer à cette fin jusqu’à quatre pions sans âme ou pensée propre, il pourra tout aussi facilement les révoquer pour pouvoir faire de la place à un nouveau venu plus avantageusement pourvu… mais pas les faire revenir si ce dernier casse sa pipe. Oui, car dans ce jeu la mort est permanente. Du coup, cela implique de protéger votre dieu déchu à tout prix sous peine de vous voir sanctionné d’un game over bien senti. Combo “old school hardcore oblige”, yay.

Bref. Toujours est-il que ces “vrais” compagnons – dont vous ne saurez généralement que peu de choses avant qu’ils ne vous emboitent le pas et qui vous rejoindront pour des raisons souvent pécuniaires – pourront vous donner accès à certains événements, mais surtout vous imposeront leurs desiderata d’une façon assez horripilante. En effet, certains d’entre eux se révéleront allergiques à des lieux précis… ne vous laissant le choix qu’entre leur départ du groupe ou un asservissement total de leur âme par votre volonté. Chose que vous pourrez d’ailleurs faire dès votre rencontre avec l’importun si avoir un valet doté d’un libre arbitre vous insupporte. Auquel cas les choses seront plus simples en sa présence, mais également plus ternes. Personnellement, j’aurais bien aimé conserver à mes côtés ma sorcière herboriste agoraphobe ; j’aurais même accepté de revenir sur ma décision d’entrer dans la ville qui nous faisait face pour cela… mais non. Contrôle mental, séparation ou chargement rapide, tels sont les seuls choix.


Pourquoi dans ce cas ai-je choisi d’abandonner ma compagnonne, me direz-vous ? D’une part parce que dans n’importe quel RPG qui se respecte, une ville constitue toujours une promesse d’aventures et de rencontres palpitantes… de l’autre parce que j’avais fait le choix personnel d’incarner une divinité “bonne” et de ne jamais soumettre l’un de mes larbins. Non que ceux-ci aient jamais émis une quelconque remarque quant à ma ligne de conduite, d’ailleurs. Quitte à poursuivre dans le domaine des anecdotes, je me souviens de la fois où j’ai vendu l’un de mes plus anciens acolytes à un marchand d’esclaves pour faire de la place à un autre ; croyez-le ou pas, mais personne n’a moufté durant la transaction. Allez comprendre.

Seul ou mal accompagné, vous vous retrouvez donc en train d’arpenter la carte du monde découpée en multiples cases où apparaîtront progressivement des lieux d’intérêts à explorer tels que des villages ou des forêts profondes, le tout marqué par le lent écoulement des jours. Entre ceux-ci, vous n’aurez rien de particulier à vous mettre sous la dent sinon des rencontres aléatoires d’ennemis sur terrain neutre, dont vous pourrez vous échapper si vous êtes assez rapides. Les lieux précédemment évoqués peuvent être explorés en temps réel et chacun abrite une faune qui disparaît définitivement une fois terrassée, ce qui fait que le jeu propose en théorie un bon équilibre entre farm et progression régulière. La réalité est hélas tout autre, mais nous y reviendrons par la suite.

Dans cette phase d’exploration, un point qui m’a fait saigner des gencives à force de grincer des dents réside dans l’absence de logique qui semble présider lors de vos interactions avec des habitants des Staglands. Je n’ai rien contre le fait d’évoluer dans un univers médiéval-fantastique sordide où le destin peut revêtir des formes très inattendues, mais j’ai du mal à digérer la perspective de me retrouver plus souvent qu’à mon tour confronté à des éléments de quêtes auxquels je ne comprends rien et dont je ne vois ni les tenants ni les aboutissants. Deux exemples me viennent en tête.

Dans le premier cas, mes gaillards s’étaient retrouvés témoins d’un meurtre et, après avoir dessoudé les responsables qui voulaient naturellement les faire taire, s’étaient contentés de piller l’endroit avant de déguerpir… ou du moins c’est ce que j’avais cru jusqu’à ce que je tombe dans une ville sur une prime posée sur la tête de la femme trouvée morte plus tôt, si bien que j’ai dû rebrousser chemin pour décapiter le cadavre qui n’avait pas bougé pour toucher la récompense. Dans le second, je suis tombé nez à nez au milieu d’une clairière avec une bande de créatures dont j’ai compris par la suite qu’elles étaient cousines de la famille des succubes – mais sur le coup il s’agissait surtout de tas de pixels surmontés d’un nom barbare –, qui se mirent à me déblatérer tout un salmigondis à propos d’hommes d’un village voisin qu’elles “vampirisaient”, ce qui avait poussé mon personnage principal à venir les trouver pour les forcer à décamper. Or, en tant que joueur, je n’avais jamais entendu parler d’elles ou de ce village avant de les rencontrer ! Toujours est-il qu’à l’issue de ce dialogue on ne m’a laissé le choix qu’entre le combat ou le déménagement de mes interlocutrices vers un nouveau lieu. Étant donné qu’elles étaient au bas mot deux fois plus nombreuses que mes ladres, j’ai naturellement choisi la seconde option… ce qui a conduit à une situation grotesque où les démones avaient envahi le village du départ du jeu mais m’attaquaient à vue, plus nombreuses encore qu’auparavant et trop puissantes pour que j’envisage même l’affrontement. J’ai donc évité l’endroit à partir de ce moment, ne souhaitant pas perdre plusieurs heures de jeu.


À présent, voyez-vous où je veux en venir ? Le principe fondamental de Serpent in the Staglands repose sur le fait que vous êtes lâché dans un monde dont vous ne savez rien et où vous devez vous débrouiller pour survivre. Vous n’avez rien. Votre carte est vierge. Vous avez un journal de quêtes mais vous devez le remplir à la main. Vous êtes plus faible qu’une saloperie de loup. Mais en plus, alors que dans la plupart des RPG les éléments d’une quête attendent patiemment que vous découvriez le premier d’entre eux pour pouvoir paisiblement s’enchaîner, dans celui-ci il est possible d’en prendre une en cours de route et donc de royalement la saboter sans même le faire exprès. Donc de rager. Donc de multiplier les sauvegardes et les chargements rapides qui malgré leur nom sont TRÈS LONGS. Saupoudrez le tout d’énigmes cryptiques et vous obtenez un mélange exaspérant.

Dieu au volant, mort au tournant

Avant de nous attaquer à la question des combats, intéressons-nous aux compétences. En effet, bien que Serpent in the Staglands soit dépourvu d’un système de classes, vous allez devoir dès le départ réfléchir à l’orientation de vos personnages si vous comptez les voir survivre jusqu’à la tombée de la nuit. Je m’explique. Après avoir péniblement grapillé les points d’expérience nécessaires, vos personnages pourront dépenser un nombre fixe de points pour améliorer leurs caractéristiques et leurs sorts ou compétences. Avoir suffisamment de points dans une caractéristique permet de débloquer un nouveau palier de techniques dans lesquelles investir. Cela vous parait simple ? Et si je vous dit que de base, un protagoniste ayant le minimum syndical en esprit aura accès à tous les sorts de premier niveau, sachant que ceux-ci peuvent relever de cette caractéristique ou de celle d’occultisme ?

Hélas, il faudra davantage mouiller la cotte de maille pour les compétences physiques, qui doivent être apprises séparément et qui sont passives ! Du coup, alors que le jeu semblait initialement promettre une grande permissivité quant à la spécialisation tactique des membres de l’équipe, on se retrouve tout de même obligé de reproduire la sainte trinité chère aux MMORPG qu’est le “tank-heal-dps”, avec un certain nombre de variantes. Du coup un affrontement se réduira souvent à ceci : un combat en temps réel avec pause active où vos barbares/assassins/archers tapent comme des sourds de façon automatique tandis que vos mages lancent des sorts flashy.

Quel est le problème, vous entends-je maugréer, Baldur’s Gate et consorts n’ont-ils pas déjà prouvé que ce système était valable ? Le problème, jeunes impertinents, c’est que l’originalité de ce jeu fait aussi sa faiblesse : dans la région des Staglands, les mages ne font pas pleuvoir le feu et ne relèvent pas les morts dans une orgie d’effets lumineux, non… ils canalisent des sorts sur une cible ou une zone, les effets de ceux-ci ayant des chances de se déclencher toutes les X portions de temps. Quel que soit le type d’arcane utilisé, il faudra donc attendre que le sorcier finisse d’incanter, puis prier pour que l’effet se déclenche aussi souvent que possible. Effet qui consiste d’ailleurs les trois quarts du temps en des affaiblissements, renforcements ou transformations, mais rarement en des dégâts directs. Du coup, les combats équilibrés traînent un peu en longueur puisqu’ils opposent des personnages sous perfusion de sort de soin à des ennemis aussi résistants que des taureaux madrilènes sous Redbull. Enfin, c’est le cas lorsque des lanceurs de sorts ne sont pas impliqués, sinon les choses prennent un tour tout de suite plus festif puisqu’ils disposent exactement du même potentiel magique que vous.


Malgré ces divers constats, les possibilités offertes par les “arbres de talents” – même si tous les personnages ont les mêmes capacités de développement, je le rappelle – permettent d’envisager de nombreuses configurations tactiques. Cela vaut également pour le cycle jour/nuit, dont le principal intérêt est d’influer sur l’étendue de votre champ de vision, lequel peut vous permettre de repérer des adversaires avant qu’ils ne vous voient et de les attirer l’un après l’autre. Et dieu sait si vous en aurez besoin, puisque les seules choses que vous apprendrez jamais d’un adversaire par sa simple observation sont son nom et une mention concernant son état physique général façon Baldur’s Gate. Cela fait d’ailleurs partie des raisons pour lesquelles la plupart d’entre vous auront du mal à passer la barre des deux heures de jeu : la claque, ou plutôt le german supplex que vous inflige la difficulté du début de votre périple.

Je résume pour les deux du fond qui dorment. Alors que vous commencez sans armes et sans pouvoirs dans un monde que vous ne connaissez pas, votre exploration vous amène rapidement à être agressé par tout ce que la nature compte de bestioles à crocs, tentacules ou dagues. Difficulté supplémentaire, la mort de votre personnage principal équivaut à la fin de l’aventure. Et là, vous vous rendez compte que même un renard peut tenir tête à un groupe de cinq humanoïdes adultes, voire même arracher la tête d’un mage avant de trépasser… et je parle d’un goupil de taille normale, pas d’une saloperie de Basse-Fosse façon Naruto ! Que dire alors d’un bandit solitaire qui découpe tout votre groupe au prix de quelques égratignures ou des meutes de loups des glaces qui hantent les cols neigeux ? Du coup on meurt. On recharge. On note dans sa tête le coin à éviter et on en essaye un autre. On meurt sur des araignées géantes sorties de l’imaginaire de Don’t Starve. On recharge. On se fait embusquer par une bande de diablotins cracheurs de feu. On meurt. On recharge. Oh pardon, vous trouvez ce paragraphe chiant ?

Eh bien dites-vous que c’est à cela que vont ressembler les premières heures de jeu. Et puis à force de prendre des claques, c’est le déclic : vous finissez par trouver LA stratégie qui convient le mieux à votre style, vous posez des pièges, vous choisissez vos combats en fonction de vos erreurs, vous essayez des trucs en fonction des compagnons qui vous rejoignent ou qui vous quittent, vous comprenez que vous pouvez vous servir des gardes des villes pour exécuter des créatures sauvages en les attirant, vous apprenez à positionner vos spadassins… c’est lent, mais vous finissez par prendre le pli, et une fois le calvaire des premiers niveaux passés vous vous apercevez que la courbe de difficulté s’adoucit, bien que les combats demeurent bien relevés. En attendant, privilégiez les affrontements à cinq contre un, les sorts de peur ou le kiting – faire courir vos ennemis après votre tank tandis que vos tireurs lardent ces derniers –, conseil d’ami.

Un jeu dur, exigeant, mais valorisant si vous êtes assez maso pour continuer. Old school power !

Comme un cheval dans le Marais de la Mélancolie

Chers lecteurs, pour ceux qui suivent mes bafouilles tapuscrites depuis suffisamment longtemps, vous savez qu’en général je suis plutôt tolérant en ce qui concerne l’emploi du pixel art dans les jeux tant que celui-ci ne descend pas en-dessous d’un certain niveau. Or les graphismes de Serpent in the Staglands joue de deux façons opposées sur ma fibre sensible. D’une part, il est indéniable que Whalenought Studios a réussi à distiller une atmosphère unique à l’univers de sa création : on a ainsi affaire à un monde médiéval et gothique insalubre, familier mais étrange, où chaque nouveau lieu exhale un parfum de mystère et de charnier en devenir. Il est dur de rencontrer un seul personnage sain d’esprit ET disposé à vous considérer comme plus digne d’intérêt que la boue sous ses bottes, mais la découverte du background par petites touches via les conversations ou de rares manuscrits est des plus agréables. Les environnements, bien que clos – il faut que les personnages atteignent un bord de l’écran pour quitter un lieu spécifique –, sont de belle taille et les environnements sonores rendent le tout plus que convaincant. 


Le problème c’est que c’est MÉGA MOCHE. Je… je ne sais pas s’il y a besoin que j’ajoute autre chose ; regardez simplement les screenshots ! Alors oui, les personnages ont quelques animations, et celles de mort en particulier sont bien réalisées, mais le reste est plus figé qu’un vieux fond de sauce ! La végétation ne bouge pas, les humains/elfes sont à peine différenciables les uns des autres à partir du moment où ils mettent un casque, on peut confondre les loups et les rochers… bon sang, même le premier Prince of Persia était plus agréable à l’oeil que cette bouillie de teintes maronnasses et ocres ! Rajoutez à cela une police d’écriture pixelisée parfois difficilement lisible – même si des efforts ont été réalisés sur ce point depuis la sortie du jeu –, et vous obtenez un univers certes unique mais à l’atmosphère hermétique qui en rebutera plus d’un. Et je vous préviens, le premier qui me dit “ambiance old school oblige”, je lui fais sauter un œil et je le lui bouffe avec des haricots verts, crénom ! C’est quand même un comble de voir ça alors que les rares portraits en pixel art des personnages sont relativement beaux et que paradoxalement l’univers est vraiment original. Heureusement que les musiques parviennent à donner un peu de légèreté à cette soupe épaisse.

Du coup, au final, s’agit-il d’un bon ou d’un mauvais jeu ? Eh bien force m’est d’admettre malgré mes coups de gueule à répétition que nous nous trouvons ici à cent lieues de la bouse vidéoludique. L’univers de Serpent in the Staglands est prenant, immersif, exigeant au-delà de la plupart des autres titres que j’ai pu tester jusqu’à présent, et on s’y sent d’autant plus impliqué que la vie de nos personnages ne tient souvent qu’à un fil. Pourtant, les dieux savent qu’il souffre de multiples défauts qui feront fuir la plupart des joueurs, à commencer par celui qu’il a le cul entre deux chaises : trop élitiste de par son manque de clarté et sa difficulté initiale, il lui manque tout de même quelques détails qui renforceraient son approche âpre mais réaliste du RPG médiéval. Comme un système de réputation, une cohérence des quêtes ou de plus larges opportunités de craft. Le genre de choses qui peuvent hélas difficilement se corriger avec un simple patch. Ensuite, c’est à vous de voir si vous préférez passer une quarantaine d’heures sur cet ersatz ou émuler un vrai jeu de la “belle époque”. Puissiez-vous y trouver votre Carthage.

+ L’ambiance médiévale-fantastique sombre
+ Un jeu pour les joueurs les plus exigeants
+ Le journal de quêtes à tenir soi-même

Note RPG 3 sur 5
Note testeur 05 sur 10

– Le pixel art moche
– Le manque de lisibilité de l’ensemble
– La difficulté insane du début
– Le manque de réactivité des PNJ

La vision de Iosword :
Le test présent plus haut est déjà très complet donc, je n’ai pas grand-chose de plus à dire. Alors pour être brève : oui, Serpent in the Staglands a de nombreux défauts et ne plaira pas à tous. Malgré une direction artistique agréable, le pixel-art est rarement maîtrisé et manquera de lisibilité. L’interface est un peu trop lourde et la police pixélisée aura tôt fait de fatiguer mes yeux myopes. Et puis, il est parfois difficile, voire un peu injuste, et vous forcera à l’analyse avant d’agir.

Mais ce n’est pas grave, car de Serpent émane quelque chose de rare : une volonté de bien faire couplé à un grand amour du genre qu’est le RPG, qu’il soit sur papier ou digitalisé. Le jeu est bien écrit, et son univers dark-fantasy est plaisant, détaillé et cohérent. Il se démarque de ce que l’on nous livre souvent de par son ambiance presque glauque. À côté de cela, une grande liberté vous est laissée dans la création de personnage et dans l’orientation que vous prendrez par la suite. Le système de combat est flexible, stratégique et le système de sort original vous réservera de bonnes surprises.

Comme Leuffen l’a dit, vous êtes perdu dans ce monde qui n’est pas le vôtre. Et c’est l’une des plus grandes forces du jeu : vous devez survivre, mais rien ne vous empêche de flâner à la rencontre d’événements aléatoires, de faire des choix parfois difficiles et souvent peu moraux. Serpent offre le droit d’écrire sa propre histoire et ne donne qu’une orientation assez vague à votre périple. C’est à vous de découvrir cet univers qui ne vous fera pas de concessions. Et rien que pour cela, j’aime Serpent. Car, même après avoir conclu mon aventure, il me reste de nombreuses anecdotes à partager et des sensations que seuls des jeux se voulant old-school, et l’ayant bien fait, peuvent me procurer.
07/10

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