C’est par pur hasard que je suis tombé sur la page de l’éditeur indépendant Rake In Grass et que j’ai découvert qu’il avait à son actif un certain nombre de jeux de tous styles. Je me suis donc décidé à tester l’une de leurs productions, Styrateg. Un jeu de stratégie avec un lourd penchant RPG, des combats tactiques et une quête prenante, dixit la présentation. Cela s’annonce bien et seul le prix – 10€ – pour un jeu de 2006 pourrait me repousser. Mais s’il en vaut la peine, pourquoi pas. Et bien, fausse joie, et ce jeu rejoindra ma horde de ratés, à mon grand désarroi. Mais je commence à avoir l’habitude. 

On s’tire à Teg ?

Tout commence par une lettre envoyée par un ami, un moine en service dans une lointaine abbaye. Il indique qu’un grand mal menace la terre, avec des hordes d’êtres chaotiques qui commencent à parcourir le royaume et une importante ville en proie à une malédiction. Le monde a besoin d’un nouveau héros. Et pourquoi pas vous ? Les textes se déclenchent lorsque vous arrivez sur une nouvelle carte ou en des lieux précis de celle-ci. Le jeu vous proposera de visiter vingt cartes différentes selon un ordre précis, tout en parcourant des environnements différents : vallées verdoyantes, montagnes enneigées et déserts bouillonnants. Il est regrettable que l’on ne nous permette pas de parcourir  des niveaux, ce qui rendrait l’aventure moins linéaire, mais surtout augmenterait la rejouabilité de ce jeu uniquement solo.

Du coup, si certaines cartes se font en 10 minutes montre en main, les dernières prendront un peu plus de temps. Avec une durée de vie aux alentours de 10 heures, on pourra toujours recommencer une partie avec une classe différente ou encore augmenter le niveau de difficulté (trois possibles) ou utiliser le mode Stratégique qui limite le nombre de tours pour traverser un niveau. Le mode RPG, lui, est en tous points identique sauf que les tours ne sont pas limités pour résoudre une map. Quel intérêt de l’autoriser dans les options ?   
 

A Styrateg, on ne fait pas la bringue !

Les défauts de ce jeu sont visibles immédiatement, dès le premier niveau. C’est une petite carte en 2D, qui se montre peu interactive et pauvre en éléments. On est en 2007, que diable ! En effet, à part cinq ou six lieux, qui ne proposent qu’une très légère interaction (commerce, loot, quête FedEx sans choix) et quelques créatures parsemées sur la map, préférentiellement proches des lieux interactifs, c’est vide.

Les cartes ne sont pas interconnectées entre elles et les missions d’un même lieu (60 au total, disent les développeurs) se résolvent forcément au sein de ce dernier. Vous ne pourrez pas revenir en arrière ou avoir des missions sur plusieurs cartes. Tout au plus, l’évolution de votre héros et de vos troupes aura une influence sur votre progression dans le jeu, mais rien d’autre. Chaque map propose donc un bout de la quête principale (trouver un objet, tuer une créature) et des quêtes annexes FedExau possible (trouver un objet, tuer une créature). Pourtant, le jeu a du potentiel, comme son créateur de niveaux, très facile d’accès, qui aurait permis à la communauté de créer ses propres histoires.

Malheureusement comme je viens de le dire, la facilité d’utilisation de l’éditeur est à l’image du faible potentiel de possibilités. Imaginez Heroes of Might and Magic 3, avec quelques lieux interactifs, une seule faction et vingt cartes et vous comprendrez.


Styrateg est un jeu de stratégie au tour par tour, où chaque unité est représentée par un pion (tileset). Vous commencez l’aventure avec votre héros, lequel sera rapidement rejoint par un moine guérisseur et un cavalier. Plus tard, vous pourrez obtenir d’autres unités, soit par le biais de quêtes, soit contre monnaie, mais cela reste une gestion d’une poignée de pions. Chaque personnage a ses propres caractéristiques ; trois au total qui sont la force, l’intelligence et l’habileté. Cette dernière permet de définir les points d’action de l’unité par tour.

Ces points d’actions sont le nerf de la guerre et permettent donc de se déplacer, d’attaquer ou de lancer des sorts qui ont un coût. Ainsi, si vous ne vous déplacez pas, vous pourrez attaquer plusieurs fois selon votre valeur. À noter qu’il est dommage que l’interface ne propose pas plus d’indications sur le coût des actions et que l’on doive tout retenir, tout comme pour le coût des sorts.

On doit même user ses points d’action pour mettre ou enlever un équipement d’un personnage. Lorsque toute votre équipe aura agi, l’IA fera de même. On notera qu’elle n’est pas très loquace et on le sent bien si on prend un archer héros. Ayant une portée de quatre, votre personnage pourra éliminer sans problème les ennemis sans que ceux-ci ou leurs voisins ne le fassent. Une stratégie qui aurait pu être intéressante si elle était un peu plus poussée.

Point d’action sans héros

Si le jeu se vante de posséder quarante ennemis différents, il faut savoir qu’ils ne rapportent pas de loot à leur mort, ce qui est quand même triste. Votre héros ainsi que ses compagnons pourront évoluer en gagnant de l’expérience en réussissant des actions – principalement en tuant des créatures. À chaque niveau, on gagne deux points à mettre dans les trois caractéristiques et deux points que l’on pourra répartir dans les compétences qui sont au maximum de six pour un même personnage. Sont compris dans les compétences, les sorts magiques ou encore les compétences de combat, de mouvement, de régénération. En fait, toute action faisable devient une compétence.

Selon la classe, vous en posséderez donc une ou deux dès le départ. Par la suite, rien ne peut vous empêcher de développer votre personnage comme un combattant/lanceur de sorts, et vous pourrez en acquérir d’autres en les achetant dans un lieu précis comme une tour de magicien. Le souci, c’est que l’on vous proposera d’acheter une compétence sur une seule carte de la campagne, alors qu’il aurait été si pratique de proposer moult sorts dans un lieu proposant des compétences magiques par exemple. Du coup, si à la carte n°6, vous ne payez pas la compétence régénération à l’un de vos héros, sachez que cette compétence ne sera plus accessible jusqu’à la fin du jeu.

À l’instar des bâtiments extrêmement limitatifs au niveau des compétences, tous les marchands proposent une vingtaine de produits à vendre, tous identiques, du début à la fin de l’histoire, ce qui est un peu mince si on fait exception des objets trouvés dans les missions. On pourra donc gonfler son potentiel puissance en acquérant ou en trouvant dans des lieux des objets que l’on pourra équiper selon six emplacements, mais là encore l’inventaire commun à tous sur le côté droit n’est  pas un modèle d’ergonomie avec par exemple l’impossibilité de jeter les objets de quêtes que vous avez gardé au lieu de les valider dans les cartes précédentes. Du coup, plus vous avancerez dans l’aventure, plus votre inventaire à défilement vertical sera lourd à gérer, au propre comme au figuré. 
 

Ouvrez les oreilles à défaut des yeux

Graphiquement, pour un jeu de 2006, on peut dire qu’il est très en retard, mais on ne va pas blâmer un développeur indépendant. En 2D, avec des héros en tileset et des graphismes assez simplets (on se croirait dans un wargame avec pions) qui me font penser à Heroes of Might and Magic 3 – qui date de 1999, je le rappelle –, mais en beaucoup moins riche, il offre une résolution limitée en 1024 par 768 et pas du tout d’options graphiques. On pourra reprocher aux développeurs ce menu principal et ces textes avec écriture gothique pas forcément lisibles, ou encore cette interface pas très pratique, mais on s’y habitue. L’avantage, si vous avez une vieille machine, c’est qu’elle le fera tourner sans peine, et en plus il n’a présenté aucun bug lors de ma partie.

Pas d’animations non plus, et des effets très timides avec les sorts, juste des sons de chevaux pour le déplacement de vos unités, que cela soit à cheval ou à pied (?). Par contre, on appréciera la musique tout à fait plaisante et bien orchestrée. Elle sied parfaitement à l’univers fantastique proposé, ce qui est tout à fait logique quand on sait que les développeurs ont fait appel à deux groupes spécialisés dans la musique médiévale, et le résultat est frais… sauf que le nombre de pistes est assez réduit. 


En fait, Styrateg ne propose rien de bien novateur, et s’il peut être plaisant d’en faire un ou deux niveaux quand on a cinq minutes, il ne demande pas un fort investissement pour s’y intéresser. Plusieurs autres défauts se font ressentir au fur et à mesure de votre progression : tout d’abord, l’échelle de l’univers dérange. Faire le siège d’un château avec des armées comprenant trois unités, cela n’est pas très réaliste, tout comme on pourrait réagir à l’échelle des créatures occupant une case, de même que les bâtiments. Tout comme il est dommage que certaines missions qui sont à effectuer dans l’urgence ne présentent plus aucun intérêt dès lors que l’on joue en mode RPG, mode dans lequel les niveaux n’ont plus de tours limités.

Styrateg se veut être un jeu de stratégie avec de forts éléments de RPG. Malheureusement, il manque de profondeur et se montre plutôt pauvre en tout, et on préfèrera s’intéresser à d’autres jeux du même type, offrant un plus fort potentiel en stratégie comme le font Elven Legacy, Silent Storm ou encore, si on veut une partie gestion, la licence Heroes of Might and Magic. Avec plus de moyens et d’ambition, il aurait pu être intéressant, car avec son éditeur de niveaux, le potentiel est là. Mais au prix proposé (plus de 10€ avec les taxes), il est définitivement à éviter car il n’aura d’intérêt que pour les débutants dans le monde des jeux de stratégie. 

+ Un éditeur de niveaux
+ La musique, mais manque de pistes

Note testeur 04 sur 10

– Pauvre graphiquement
– IA inexistante
– Pauvre en contenu

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