vendredi, avril 26, 2024

Baldur’s Gate : Enhanced Edition

Ce test a été écrit par Andariel et publié à l’origine le 3 décembre 2012 sur le site RPGFrance.

NOTES FINALES

Note de l'auteur
4
Note RPG
10

Dans la vie il y a deux catégories : Ceux qui ont un Carsomyr chargé et ceux qui creusent… Heu, ahem, attendez, je la refais…  Dans la vie il y a deux catégories : Ceux qui aiment se délecter des bonnes soupes dans leurs vieilles marmites et ceux qui préfèrent bouffer ces bonnes soupes dans un emballage de menu Macdo… Ce sont ces derniers qu’Overhaul Games tente de satisfaire en cette fin d’année 2012. Pour se faire, ils misent tout sur ce Baldur’s Gate : Enhanced Edition, version (quelque peu) remise au goût du jour de la légende de Bioware/Black Isle. On franchit ainsi le cap de la fameuse fibre nostalgique des aficionados (desperados ?) d’un côté, et on met le cap sur de nouveaux horizons, comme celui des ​émergents Smartphones de l’autre. Alors ? Baldur’s Gate : Enhanced Edition, il est cap ou pas cap ? 

La sortie de Baldur’s Gate en 1998 a fait l’effet d’une bombe dans les rangs des rôlistes, et on a très vite fait d’y voir une véritable consécration du RPG. Quatorze ans plus tard, le monde vidéoludique a bien changé et pour beaucoup, les Portes de Baldur font partie d’une époque désormais révolue… Pourtant, en 2010, un certain Trent Oster ayant travaillé chez Bioware par le passé, s’unit avec quelques vieilles connaissances pour fonder Beamdog, une plateforme de distribution dématérialisée. Très vite, la division Overhaul Games y prend forme et se met aussitôt à travailler sur des versions HD et des portages console d’anciens jeux Bioware, à commencer par MDK 2.

Ainsi, comme son nom l’indique, Baldur’s Gate : Enhanced Edition fait plus office d’une version remasterisée du jeu de base et de son extension Tales of The Sword Coast, avec divers tweaks et du rajout de contenu. Prévu pour sortir en même temps sur iPad, Android et Mac que sur PC, un paquet de désagréments en a voulu autrement, et c’est donc le PC qui en est le prioritaire, essentiellement via le site de Beamdog. Les dieux du PC veillent au grain on dirait !    

Hé ! C’est moi, Andariel ! C’est bon de vous revoir !

Baldur’s Gate, c’est l’histoire d’un orphelin au passé nébuleux que vous aurez le plaisir d’incarner. Recueilli par le sage Gandal… Euh, Gorion, vous avez passé votre paisible jeunesse à l’intérieur des murs réconfortants de Château-Suif. Jusqu’au jour où votre tuteur barbu vous somme d’empaqueter vos affaires et de l’accompagner au-delà des murs du château dans une hâte aussi inhabituelle qu’inquiétante. Très vite, vous étés assaillis par un crapuleux personnage adepte des ricanements gratuits et sa bande de chair à canon qui en veulent particulièrement à votre vie.

Dans son ultime tentative d’assurer votre fuite, papi Gorion se sacrifie devant vos yeux de lâche et croule sous les lames ennemies. Vous vous retrouvez ainsi seul, abandonné et sans repère, mais c’était sans compter sur cette importune d’Imoen qui ne manque pas de vous rejoindre. Ensemble, vous aurez pour quête de rejoindre de vieilles connaissances avec lesquelles vous partirez à l’aventure pour démanteler un complot de méchants et patati patata…


On ne peut pas dire que le scénario de Baldur’s Gate soit vraiment rebutant, mais il faut avouer qu’il a plutôt mal vieilli et qu’il souffre, en plus, de son lien avec celui de sa suite, Baldur’s Gate 2. Ainsi, on ne nous épargne pas quelques bons gros poncifs bien kitsch, une pelleté d’événements prévisibles, des trucs bien manichéens et des personnages clés globalement peu attachants. De surcroît, la trame s’avère trop diluée dans un conflit pseudo-politique difficilement intéressant, plutôt que de piocher davantage dans la quête personnelle autrement plus attrayante…

Mais bon, tout ceci est un peu rattrapé par le contexte touffu de la deuxième édition du jeu de rôle papier Donjons & Dragons avec une Côte des Épées tourmentée par le banditisme, les conflits et les mystères… Malgré tout, l’écriture des nombreux dialogues, ma foi bien fournis, qui agrémenteront votre aventure jouit d’une qualité évidente, et ne manque pas d’un charme et d’un humour estimables. En témoigne l’empreinte laissée par certains personnages emblématiques genre Tiax ou Minsc. Dommage qu’on ne puisse pas en dire autant de l’écriture des quêtes secondaires qui, le plus souvent, tournent autour de courses Fedex, à coup de babioles à rapporter et de bestioles à latter.

Vous devez réunir votre pognon avant d’aller plus loin.

Bien évidemment, le Donjons & Dragons ne se limite pas à l’univers, mais se situe aussi au niveau des règles régissant le jeu, et ce pour le plus grand bonheur des rôlistes. Vous en aurez un bon aperçu lors de la création bien garnie de votre personnage principal avec des choix de personnalisation divers et variés, de la génération aléatoire de statistiques et tout le toutim… Après quoi, vous êtes tout bonnement lancé dans cette aventure en vue 2D isométrique peinte à la main dans la lignée des Ultima, à la croisée d’un Fallout et d’un Diablo. Il vous incombe alors de réunir un groupe d’aventuriers allant jusqu’à six personnages, de se faire plaisir avec un éventail d’équipements dûment acquis et gagner en puissance suite à vos accomplissements.

Baldur’s Gate dispose ainsi d’un système d’alignement pouvant être à l’origine de prises de bec, voire carrément des scissions, inter-membres de l’équipe, ainsi qu’un système de réputation qui prend plus ou moins en compte vos actions glorieuses et douteuses. Dés lors, vous aurez à explorer le terrain de jeu à votre guise, sans marqueurs intrusifs, allant des étendues sauvages et des petits villages paumés, jusqu’à la fameuse cité de la Porte de Baldur. Le jeu et son extension promettent ainsi une bonne centaine d’heures d’aventure et de rencontres de toutes sortes. Cependant, là où la grande taille des cartes à parcourir est appréciable, le fait que celles-ci soient si vides et si pauvres en intérêt est finalement attentatoire à l’exploration. Ben quoi ? On n’est pas venu pour de la randonnée pédestre quand même  !     


Heureusement qu’il y aura amplement l’occasion de faire parler les épées et non les mots, comme diraient certains. A cet effet, l’une des particularités du moteur du jeu, l’Infinity Engine, transparaît haut et fort : la possibilité d’enclencher à tout moment une pause active permettant d’assigner ses ordres avec une réflexion bien stratégique. Ainsi, dans leur hommage aux préceptes du jeu de rôle papier adapté, les combats seront l’occasion de gérer intelligemment les placements de votre équipe selon leurs classes et leurs capacités, et d’utiliser un nombre honorable de sorts profanes et de sorts divins dotés d’une multitude d’effets. Il sera alors question de bien prévoir les sorts à mémoriser avant les repos indispensables pour le lancement de ses derniers et pour la revigoration de l’équipe. Bref, une bonne grosse dose de plaisir en perspective.      

Et avec la quantité de challenge dont dispose ce Baldur’s Gate, il y a franchement de quoi se gratter la tête, voire s’arracher les cheveux, dans les combats. Le jeu offre quatre niveaux de difficulté modifiables à volonté. Pour autant, il reste relativement ardu, surtout au début de l’aventure. En effet, vous débutez avec quelques misérables points de vie et il en faut peu pour que vous explosiez en viande hachée sous le coup critique d’une flèche hobgobline. De l’autre coté, vous serez bien frustré de voir vos personnages aussi gauches que de vieux ivrognes effrontés, ratant attaque sur attaque. Pourtant, c’est comme ça que l’on l’aime notre RPG : noir, bien serré et bien corsé !       

Vise les yeux, BGEE, vise les yeux ! Aieuh !!!  

Allez, il est grand temps d’inspecter l’Enhanced Edition de plus prés, même à nos risques et périls… Eh bien, cette nouvelle mouture ne touche pas à un poil du scénario de Baldur’s Gate. Elle s’attaque tout au plus à ses cinématiques en les remplaçant par des images animées un peu cheap, dans un style cartoon qui tranche assez avec le ton esthétique sobre du jeu et qui ne fera sans doute pas l’unanimité… Maintenant, s’il y a deux choses qui ont mal vieilli et au niveau desquelles on attendait l’intervention salvatrice de cette version, c’est bien les graphismes et l’interface… Ben, force est de constater qu’Overhaul Games ne s’est pas foulé des masses à ce niveau…  Déjà que ce n’est pas un remake, il ne s’agit aucunement d’une version HD, vu que les textures du jeu demeurent inchangées. On n’a finalement pas fait plus que les mods communautaires déjà disponibles en offrant le support des hautes résolutions et des écrans larges. Je serais même tenté de dire qu’on a bêtement repris les travaux de la communauté et qu’on a servi un plat réchauffé dans une assiette recyclée.


Ce constat s’impose lorsqu’on retrouve carrément le mod TUTU dans cette version. Ainsi, le jeu se base désormais sur le moteur de Baldur’s Gate 2, affichant de ce fait un rendu plus fin et proposant les nombreuses classes, sous-classes et races issues du deuxième opus. L’un des seuls apports inédits de cette version à ce niveau reste la possibilité de zoomer. Une feature qui se révèle très vite anecdotique, tant le zoom rend l’image floutée et pratiquement injouable… Du côté de l’interface, on s’est contenté de petites retouches cosmétiques en terme de couleurs et de polices de caractères, mais on n’a pratiquement rien amélioré. L’HUD est toujours aussi encombrant, l’accès aux menus est toujours peu intuitif, les raccourcis clavier ne sont toujours pas totalement paramétrables et le nombre d’icônes de raccourcis est toujours aussi ridicule. Toujours pas de configuration de la résolution, du mode d’affichage ou des effets graphiques. Rien de nouveau sous le soleil d’Amaunator quoi…  


Baldur’s Gate : Enhanced Edition a même le culot d’être plus mal optimisé que la version qu’il était venu secourir (sic). Le jeu est non seulement capricieux avec une bonne tripotée de configurations, mais il s’avère en plus royalement buggé… Entre un bug qui fait littéralement disparaître le curseur de souris au détour d’un drag & drop, et un autre qui bloque la sélection des membres de l’équipe vous empêchant de les contrôler, on assiste à un carnaval de frustrations, indigne d’une version soi-disant améliorée. Déjà qu’on n’a pas daigné toucher le pathfinding qui est encore et toujours véritablement problématique, quand votre équipe se coincera dans les décors ou fera des détours farfelus… De l’autre côté, on a tout de même pensé à un peu peaufiner le multijoueur et le potentiel coopératif du jeu, avec l’ajout des fonctionnalités de création de parties et de gestion multi-supports (qui ne sert à rien jusque là). Mais bon, le multi est loin derrière celui des Icewind Dale qui reste finalement mieux pensé et plus fun.          

Aventure, camaraderie, acier sur acier, les ingrédients légendaires. Hein, BGEE ?

Reste maintenant l’apport de cette Enhanced Edition en terme de contenu. En fait, le jeu nous propose désormais trois personnages recrutables inédits : Neera, la mage sauvage demi-elfe avec son look emo et la romance troublée qu’elle propose. Rasaad, le moine nu comme un ver et sa quête vengeresse qui nous emmènera jusqu’à la nouvelle zone des Pics Nuageux. Et enfin, Dorn, le demi-orque chevalier noir trop dark et sa quête vengeresse (encore ?), prétexte pour aller dézinguer du vilain… Du contenu sympathique tout au plus, loin d’être vraiment bousculant non plus, mais qui fait difficilement osmose avec ce que contient le jeu original…

En effet, là où les interactions avec les membres du reste de l’équipe sont assez sommaires, ceux de ces personnages là vont plus dans le sens de Baldur’s Gate 2 de part leurs interventions nombreuses et empiètent ainsi clairement sur les personnages de base… A côté de ça, cette version propose le contenu indépendant des Fosses Noires : Une arène  où vous créerez un nouveau groupe de personnages avec des vagues d’ennemis à occire encore et encore, entrecoupées de petites phases de commerce… Globalement, le contenu inédit tourne autour des cinq heures de jeu, loin de la quinzaine d’heures promise donc, et ce n’est finalement qu’une goutte dans l’océan de la grosse durée de vie du jeu.        


Enfin, sachez que la version française, dont la localisation a été assurée par des bénévoles de la communauté, se paye carrément le luxe de ne pas avoir de doublages, et c’est tout bonnement un silence total qui est venu remplacer les voix de la version française… Même s’il faut avouer que les musiques remasterisées et les compositions inédites sont plutôt correctes dans l’ensemble. Pourtant, pour une “nouvelle” version vendue pratiquement le double du prix du jeu d’origine, donc au même prix que l’ensemble de la saga (deux opus et deux add-ons), on ne peut pas s’empêcher de sentir la douce odeur de l’arnaque. Surtout que cette version n’est désormais plus compatible avec les mods gratuits du jeu original, ces mêmes mods qui permettent facilement d’arriver à un résultat très similaire. Ouais, on est de la catégorie de ceux qui crachent dans la soupe chez Overhaul Games… 

Attention, qu’on ne se méprenne pas ! Baldur’s Gate en lui même vaut son pesant de cacahuètes et mérite sans conteste un élogieux 8/10. C’est un jeu tout droit sorti de l’âge d’or du RPG qui, malgré ses quelques petites faiblesses ici et là, promet une aventure foisonnante, subtile, bien copieuse et tout à fait mémorable… Maintenant, ceci étant dit, c’est plus la légitimité de cette Enhanced Edition qui est contestée dans ce test. De toute façon, s’il y a un test où, pour une fois, il faut complètement se foutre de la note et s’intéresser à son contenu, c’est bien celui-ci.

Cette nouvelle mouture constitue l’expression flagrante de la paresse et de la facilité qu’il y a derrière. C’est une initiative racoleuse pour exploiter le statut légendaire de la licence et n’est dés lors qu’un prétexte pour un portage juteux sur Smartphones. L’Enhanced Edition passe outre les soucis qu’on espérait voir réglés, se démarque à peine  de ce qui est déjà existant et propose un contenu relativement passable. Baldur’s Gate se paye même le luxe d’être doublement plus faiblard techniquement que le jeu d’origine, tout en étant doublement plus cher.  

Finalement, peu importe que vous soyez un néophyte ou un fan du jeu. Si vous êtes du genre à jeter l’argent par les fenêtres, et que vous voulez rapidement et simplement vous lancer dans une compilation de mods payante, alors cette version est faite pour vous. Si par contre vous êtes de ceux qui veulent optimiser un minimum leurs achats, et que suivre quelques instructions pour installer des mods gratuits ne vous dérange pas, alors rabattez-vous sur la version d’origine. Et comme le dirait Minsc : “Dupe-moi une fois, honte à toi ; Dupe-moi deux fois, fais gaffe ! Je suis énorme !”

+ C’est Baldur’s Gate avec quelques ajouts

Note RPG 5 sur 5
Note testeur 04 sur 10

– Apports de l’EE très passables
– Plus buggé et mal optimisé que l’original !
– Pathfinding toujours aussi mal fichu…
– Doublages VF carrément absents !
– Prix exubérant par rapport au jeu d’origine

La vision de Killpower :
A la différence d’Andariel, j’apprécie énormément cette Enhanced Edition. Pourquoi ? Tout simplement, parce que j’ai eu l’occasion de jouer à la version originale en 1998. Elle tenait sur plusieurs CD-rom, s’installait en une demi-heure minimum et était boguée à mort. A l’époque, on attendait les mensuels pour avoir les patchs car Internet en était à ses débuts. J’ai rangé les CD et j’ai patienté, même si j’ai acheté l’extension.

Il m’a fallu attendre 2 ans, en fait la sortie du second épisode, pour me mettre au premier. Et ce n’était pas encore la gloire pour des raisons matérielles. Alors, une dizaine d’années après, la sortie de cette Enhanced Edition, version améliorée a été pour moi une révélation pour m’y remettre et vraiment prendre conscience des qualités incroyables de ce titre. Du bonheur surtout en mode loup solitaire. Même le second me paraît bien terme tellement ce premier opus m’a envouté.
09/10

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Site ayant vécu de 2009 à 2022 et traitant de l'actualité des jeux vidéo RPG. Le site ayant disparu, l'équipe de RPGjeuxvidéo, sous l'action de Killpower, ancien président de RPGFrance, a essayé de rendre hommage aux nombreux rédacteurs qui ont participé au site, en reproposant leurs articles qui, sinon, auraient été perdus à jamais. Si vous êtes l'auteur de cet article, contactez-nous et inscrivez-vous, nous mettrons le texte à jour.

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