vendredi, avril 26, 2024

Darkest Dungeon 

Ce test a été écrit par Ymir et publié à l’origine le 13 mars 2017
sur le site RPGFrance.

NOTES FINALES

Note de l'auteur
9
Note RPG
6

La vie d’un aventurier n’est pas aisée. Si incarner le Nérévarine vous assure de ne pas vous faire égorger par le premier venu, pour le mercenaire lambda la rencontre avec les aberrations qui hantent les profondeurs des ruines obscures peut s’avérer aussi terrifiante que mortelle. Ainsi, les pauvres bougres qui seront désignés afin d’explorer ces lieux maudits pourront rencontrer la mort et la folie à chaque instant. Pour la plupart d’entre nous, les donjons ont arrêté de nous émerveiller ou de nous horrifier depuis fort longtemps, ils font désormais partie d’un quotidien fictif dont les protagonistes que nous incarnons sont coutumiers.

Pourtant, il n’y a rien d’anodin à se faire éviscérer par un piège disposé entre des dalles poussiéreuses, ou encore à affronter des carcasses animées d’une soif de sang inextinguible. La mortalité et l’horreur qui imprègnent de tels lieux nous est difficilement perceptible derrière un lancé de dés et un écran, et encore moins lorsqu’il nous est possible de reprendre d’une précédente sauvegarde. Cette crainte permanente du trépas et de l’obscurité, cette appréhension de l’avenir à mesure que vos pas vous portent dans les entrailles de la terre, cette peur qui vous prend aux tripes alors que l’adversaire réduit vos compagnons à l’état de charpie et que seul le désir de fuir enserre votre esprit, voilà ce qu’est Darkest Dungeon.

Great heroes can be found even here, in the mud and rain

Votre ancêtre aura fait bien pire que de dilapider sa fortune et salir le nom de votre noble lignée : il aura éveillé quelque chose de terrible sous les fondations les plus profondes de votre domaine.


Votre héritage comprend ces terres ainsi que le devoir de rédemption qui accompagne les atroces exactions dont votre prédécesseur fut coupable. Darkest Dungeon est un titre impitoyable mais point ingrat. La voie est longue et parsemée de cadavres, mais l’expérience des nombreux échecs qui vous attendent ne manquera pas de vous prévenir de reproduire les mêmes erreurs. Sang froid et patience seront vos meilleurs alliés dans l’obscurité rampante qui couvre désormais vos terres. En ces lieux, la vie n’a guère de valeur, tout comme l’or : ce n’est qu’une ressource à dilapider afin de triompher du mal antédiluvien qu’ils abritent. Les considérations morales sont un luxe que vous ne pouvez vous permettre, et à ce titre la promesse de fortune et de gloire ne manquera pas d’attirer le content de chair à canon nécessaire à votre croisade. Soyez assuré que la rumeur de votre venue vous promet un afflux constant de braves à sacrifier dans votre quête.

Le concept de mortalité est d’ailleurs omniprésent au sein du titre, et la direction artistique n’est pas en reste. L’œuvre gothique est directement inspirée du folklore lovecraftien, et dispose de visuels dessinés à la main. Loin d’être minimaliste, le travail de l’artiste a parfaitement su saisir ce je-ne-sais-quoi qui fait le charme d’ouvrages tels que Les Montagnes hallucinées ou Le Cauchemar d’Innsmouth. La plume de l’artiste a su capturer l’essence des œuvres de ce cher H.P sans jamais tomber dans la vulgarité crasse et la facilité. C’est avec un talent certain et une relative subtilité qu’il vous sera en permanence rappelé l’horreur qui imprègne les lieux. Les visages inquiets de vos héros, les détails sordides et souvent subtils concernant vos adversaires, les décors majestueusement glauques qui permettent de s’imprégner de l’horreur ambiante tout en s’émerveillant de la somptuosité qu’avaient jadis ces territoires, sont autant d’éléments qui vous transportent dans cette lugubre aventure.

La musique composé par le talentueux Stuart Chatwood est un trésor de créativité qui souligne toute la futilité de cette quête à travers des symphonies illustrant la souffrance et l’oppression dont sont victimes les mortels qui entrent en ces lieux. L’horreur et le désespoir semblent alors s’exprimer à travers des percussions brutales et des chœurs où des chants gutturaux se disputent à des airs mélancoliques. Il est important de souligner que le titre se transforme selon la lumière ambiante : ainsi lorsque l’obscurité s’accentue, la musique en fait de même et devient progressivement plus distordue et maligne.


La voix du narrateur incarné par votre ancêtre, est celle du talentueux Wayne Jude, qui se révèle aussi caverneuse que mémorable. Je ne pense pas exagérer en avouant que je n’ai jamais constaté un tel doublage tous médias confondus ; l’ habilité de l’acteur n’a rien a envier à mes yeux aux pourtant très talentueux seiyuu de l’archipel nippon. Le verbe rauque de votre ancêtre vous accompagnera tout du long, contant les raisons de sa déchéance tout en vous avertissant des dangers qui vous guettent. Loin des agaçants rappels d’un certain maître de guilde mentionnant avec insistance la nécessité de prendre vivres et potions, les commentaires prononcés aux accents aristocrates ne lassent point et se mêlent à l’atmosphère si particulière du titre, vous plongeant dans ce curieux mélange malsain et envoûtant dont les œuvres inspirées du travail de Lovecraft ont le secret.

Madness our old friend

Le hameau décrépit non loin de votre demeure familiale vous servira de camp. Il vous appartiendra de restaurer cet humble village au moyen des matériaux que vous obtiendrez lors de vos explorations. Vos sbires pourront passer de vie à trépas en un instant, et les réparations du hameau et de ses édifices quant à elles seront occasionnellement menacées par les abominations qui hantent désormais ces terres. Ainsi, lorsque le souvenir des horreurs aperçues aura affligé vos mercenaires de maux de l’esprit, un repos s’imposera. Certains trouveront alors la sérénité entre les vastes arcades sculptées de la paisible abbaye, les autres au milieu du vacarme chaleureux de la taverne.


La mort n’est pas la seule chose qui attend vos hommes : la psyché humaine est fragile et les limites de leurs esprits seront mises à rude épreuve lorsqu’ils abandonneront la relative sécurité du hameau. La folie tient une place toute particulière au sein du titre, le stress sera un adversaire plus insidieux et redoutable que les horreurs qui hantent les lieux. Ainsi, lorsque celui-ci progressera jusqu’à remplir la barre qui lui est attribuée, votre héros sera mis à l’épreuve. Il sera alors plongé dans les abîmes de la folie ou trouvera la force de surmonter les obstacles qui seront placés sur son chemin. Les afflictions et vertus sont nombreuses, et de cette différence peuvent naître des comportements disparates. Un héros masochiste par exemple refusera ainsi les soins, se blessera à chaque début de tour, provoquera l’adversaire et refusera d’envisager toute retraite. Si le héros est vertueux il n’aura alors plus à craindre le stress et disposera de buffs et avantages divers, néanmoins si ce dernier cède à la folie le stress continuera de progresser jusqu’à provoquer une crise cardiaque qui le placera aux portes de la mort.

Le titre propose des affrontements au tour par tour qui ne manqueront pas d’offrir des sueurs froides aux plus aguerris. Quatre héros et monstres peuvent s’affronter au travers des dédales que vous aurez l’occasion de parcourir. Le positionnement revêt une importance toute particulière, car selon l’emplacement certaines capacités pourront ou non être utilisées, et certains adversaires pourront se trouver hors de votre portée. Cette formation pourra être mise à mal face à certains adversaires qui affectionnent particulièrement de déplacer vos sbires, rompant ce précaire équilibre sur lequel vous comptiez afin de l’emporter. Bien entendu, il vous sera également possible de faire subir le même sort à vos adversaires : un arbalétrier ramené au corps a corps par exemple ne représentera plus qu’une piètre menace. Lorsqu’un adversaire trépasse, il laisse par ailleurs un cadavre, celui-ci peut bien entendu vous nuire grandement : il empêchera vos guerriers d’attaquer ceux abrités derrière lui et pourra même être utilisé par moult nécromanciens, sorcières ou ectoplasmes à des fins bien plus terribles… Afin d’éviter cela, il vous faudra reposer sur la chance et espérer un coup critique ou bien user d’altérations. Ainsi, les saignements et infections infligent des blessures à chaque tour et ne laissent jamais de carcasse. Il existe bien sur d’autres afflictions allant du simple étourdissement a certaines plus plus subtiles.

Le domaine est constitué de cinq parties, chacune disposant de ses particularités et adversaires. Ainsi afin de pouvoir vous aventurer dans le darkest dungeon, il sera nécessaire d’explorer la crique, la futaie, les ruines ainsi que les tanières. Les affrontements dépendent d’ailleurs beaucoup des adversaires des différents donjons. Ainsi, les abominations pélagiques de la crique sont particulièrement résistantes aux saignements et en affligent de terribles. Les monstruosités fongiques de la futaie quant à elles disposent d’une armure naturelle et répandent leurs spores, infectant toute créature à leur contact. Les hommes porcs des cavernes sont aussi répugnants que nauséabonds et transmettent de nombreuses maladies. Les cadavres réanimés de la crypte sont bien évidement immunisés aux saignements, toute vie ayant abandonné leur ossements depuis fort longtemps.

Mais avant de vous aventurer dans ces lieux nauséabonds, il vous faut faire le plein de provisions. Le coût des vivres et autres consommables peut s’avérer coûteux, mais les donjons ne pardonnent pas la moindre imprudence alors mieux vaut s’y aventurer préparé. Darkest Dungeon fait la part belle à l’aléatoire, les donjons sont ainsi générés procéduralement et le hasard est omniprésent le long de l’œuvre. Le titre ne manque pas d’épreuves : votre groupe dispose par exemple d’une chance de connaître la nature des environs, ce qui lui épargnera bien des tracas, il sera également nécessaire de consommer les vivres à certains moments sous peine de souffrir de stress et de blessures non négligeables. Vous disposez également de la possibilité de surprendre l’adversaire ou d’être surpris à votre tour, si l’effet de surprise peut jouer en votre faveur une embuscade peut sonner le glas des aventuriers assez aisément.


Des comportements peuvent également naître des terrifiantes rencontres et interactions que les aventuriers ne manqueront pas d’avoir lors de leurs explorations. Ces attributs agissent comme des avantages et inconvénients passifs qui rendent chaque personnage non pas unique, mais peu s’en faut. Ainsi, deux bandits pourront être fort opposés si le destin en décide ainsi ; l’un d’eux pourra par exemple être particulièrement maladroit de son pistolet, endurant, cleptomane et alcoolique tandis que l’autre, bien qu’interdit de jeu en ville, disposera d’un œil d’aigle et de réflexes vifs. Les slots concernant les attributs sont limités au nombre de dix. Les nouveaux attributs remplacent les anciens et heureusement pour vous, les attributs défavorables peuvent être supprimés. Il vous est également possible de verrouiller trois attributs favorables afin d’éviter de perdre de précieux avantages. Sachez également que des événements aléatoires ne manqueront pas de rythmer la vie de la sordide bourgade, ajoutant ainsi un certain dynamisme aux haltes entre vos explorations de ce qui fut autrefois une lande fertile et riche.

Huddled Together, Furtive and Vulnerable. Rats in a maze.

Le titre conformément à son nom accorde une grande importance à la lumière ambiante ; ainsi lorsque votre torche illuminera les recoins obscurs, il vous sera plus aisé de repérer les alentours et de surprendre vos adversaires. À l’inverse, vous aventurer dans les ténèbres vous permettra de trouver fortune plus aisément mais vous rendra vulnérable. Comme tout donjon qui se respecte, celui-ci regorge de pièges et de curiosités. Il ne sera pas surprenant de trouver ainsi au détour d’un corridor un étrange autel ou encore des ouvrages anciens. Les effets de ces derniers sont là encore aléatoires, bien que certaines provisions peuvent être utilisées afin de minimiser les chances de malus lors de leur utilisation – utiliser par exemple des herbes médicinales sur la carcasse lacéré et méconnaissable d’un animal vous permettra d’en récupérer la viande, alors que sans ces précieux simples il est probable que l’idée de finir comme cette créature rende votre aventurier phobique ou que la viande putride le rende malade. Dans de tels cas, un séjour au sanatorium sera nécessaire. Heureusement pour vous, les maladies et autres humeurs ne pourront résister aux concoctions et à la dévotion des placides gardiennes des lieux. Soyez également averti que dans l’obscurité rôde une monstruosité particulièrement dangereuse et tenace qui pourra surgir de l’ombre de chaque corridor si la chance n’est pas de votre côté.


Lors de longues expéditions, il vous sera possible de faire un bivouac. En plus de récupérer santé et stress moyennant des vivres, vos héros pourront utiliser des compétences de survie qui feront bien souvent la différence entre la victoire et l’annihilation totale. Si le hasard peut parfois être un adversaire plus redoutable que les créatures qui hantent les lieux, il est avant tout nécessaire de savoir quand se retirer. La prudence est ici la meilleure des alliées, et l’excès de confiance le pire des adversaires. Si les donjons sont agréables à parcourir, il est nécessaire de mentionner que le titre nécessite beaucoup de grind, même pour un roguelike. En conséquence, le mode Radiant, lequel propose une aventure plus courte, sera probablement le bienvenu chez ceux qui sont rebutés par cet aspect du titre.

Darkest Dungeon est une aventure laborieuse et terrible. Tel Dante, vous serez condamné à observer la folie et l’horreur s’emparer des mortels, parcourant ces lieux maudits dans l’espoir d’un jour meilleur, d’une rédemption. Les horreurs sans noms qui arpentent désormais ces lieux sont moins terribles à contempler que les digues de l’esprit qui cèdent devant les monstruosités intangibles qu’abritent les tréfonds glacées de l’univers, étrangers à toute logique. Alors préparez vous et souvenez vous qu’il ne peut y avoir de bravoure sans folie. L’enfer vous attend, mais dans cette abîme béante vous trouverez votre rédemption.

+ Direction artistique
+ Système de jeu
+ Narrateur
+ Traduction

Note RPG 3 sur 5
Note testeur 09 sur 10

– Grind Laborieux
– Aléatoire cruel
– Addiction probable à la voix de Wane Jude

RPGfrance
RPGfrance
Site ayant vécu de 2009 à 2022 et traitant de l'actualité des jeux vidéo RPG. Le site ayant disparu, l'équipe de RPGjeuxvidéo, sous l'action de Killpower, ancien président de RPGFrance, a essayé de rendre hommage aux nombreux rédacteurs qui ont participé au site, en reproposant leurs articles qui, sinon, auraient été perdus à jamais. Si vous êtes l'auteur de cet article, contactez-nous et inscrivez-vous, nous mettrons le texte à jour.

Avis des membres : (0)

Ce test n'a pas d'autre avis.

Articles récents

Vous voulez donner votre avis sur le jeu ?

S’abonner
Notifier de
guest
0 Commentaires
Inline Feedbacks
View all comments
La vie d'un aventurier n'est pas aisée. Si incarner le Nérévarine vous assure de ne pas vous faire égorger par le premier venu, pour le mercenaire lambda la rencontre avec les aberrations qui hantent les profondeurs des ruines obscures peut s'avérer aussi terrifiante que...Darkest Dungeon 
0
Envie de laisser un commentaire ? x